samedi 23 juin 2007

En direct des Carpates

L'affiche d'un film inoubliable...



Nous y voilà ! Après un long cheminement avec 1.e4 e5 2.Cc3 Cf6 3.Fc4 Cxe4 4.Dh5 Cd6 5.Fb3 Fe7, voici maintenant le temps de la variante critique 5….Cc6
Le coup universellement reconnu dans cette position est 6.Cb5 ! qui mérite un petit diagramme (diagramme 1)

Il existe une autre possibilité que je ne connais pas trop, car le coup du texte 6.Cb5 ! m’a toujours apporter de belles parties.
Bref, l’autre coup est 6.d4. Il s’agit du gambit Adams, non pas du nom du joueur Anglais actuel, mais il s’agit d’un Weaver Adams, Américain des années 1950 qui analysa longuement la Viennoise et y apporta sa touche.
Si vous vous débrouillez en Anglais vous pouvez trouver ici http://www.chessville.com/instruction/Openings/Martin/May04.htm
Une partie analysée sur le sujet. Mais à vrai dire je ne crois pas trop à ce gambit.

Bref revenons à nos moutons avec 6.Cb5 !
Un coup paradoxal. Vous avez joué la dame au début de la partie, et voilà maintenant que vous rejouez une pièce pour la seconde fois. Bref, tous les principes que vous avez appris volent en éclats…En fait les blancs gagnent de façon forcé du matériel.

J’allume une torche et je vous invite à me suivre, si toutefois vous n’avez pas peur.
Nous nous dirigeons vers la face obscure du jeu d’échecs.
Très vite nous apercevons une lumière au bout du couloir.
Deux personnages monstrueux sont assis face à face et viennent de débuter une partie d’échecs. Gardons nous de les déranger et observons !

Le comte Vlad Tepes Dracula (qui joue avec les pièces noires) regarde étrangement son adversaire, Frankenstein (Oui celui avec une grosse vis qui lui traverse la tête) et s’apprête à lui prendre le cavalier par 6….Cxb5?? (diagramme 2)




Une perle (de sang) lui coule sur le front, car il vient de se rendre compte que c’est mat en f7 s’il joue ce coup horrible. Il se ravise et avance le pion pour attaquer la dame 6….g6 !



L’alternative n’est pas bonne pour les noirs, par exemple
6….De7 ?! 7.Cxc7 Rd8 8.Cxa8 b6 9.d3 Fb7 10.Cxb6 axb6 11.Fe3 Rc7 12.f3 g6 13.Dg5 f6 14.Dg3 (diagramme 3) Harding / Stockwell, Londres 1971, avec un bon avantage pour les blancs. Cela ressemble à la grande variante, mais les noirs n’ont pas poussé leurs pions.



Revenons à la variante principale
7.Df3 (diagramme 4) le cavalier est toujours imprenable du fait du mat en f7.
Les noirs ont maintenant trois options. Deux options sans éclat 7….Cf5 et 7….f6 et la variante principale 7….f5.

Pour la variante principale il faudra un peu patienter…
Aujourd’hui je vais vous parler de 7….Cf5
Il existe deux façons de jouer pour les blancs. Ces deux variantes mènent à un avantage et il s’agit alors d’une question de choix de votre part. De mon côté je préfère la deuxième méthode.

Méthode N°1 ;
8.Dd5
(diagramme 5) Les blancs continuent à essayer de placer le mat du berger à leur adversaire. Notez que ce n’est pas par irrespect… 8….Ch6 9.d3 ! Voir la partie exemple ci-après. C’est comme cela que vous devrez jouer si vous faites ce choix avec 8.Dd5


Je pense que le tentant 9.d4 est plus risqué. La suite est forcée 9….d6 10.Fxh6 Fe6 11.Df3 ?
Ici le seul coup pour les blancs est 11.Fg5 Dxg5 12.Cxc7 Rd8 13.Cxe6 fxe6 14.Dxe6 Dxg2 15.Fd5 Dg5 16.Cf3 De7 et les noirs ne craignent pas grand-chose. (diagramme 6)







J’ai longtemps cru qu’après 11.Df3 ? Les blancs étaient simplement gagnants. En effet, ils ont une pièce de plus et menacent une fourchette en d5. Ce sentiment a été réconforté par une victoire éclair contre le GMI Radoulov en 1994 à Aubervilliers (voir la partie en annexe).
Mais quelques temps plus tard j’ai découvert qu’il était probable que les blancs soient…très mals.



La partie Mieses / Burn jouée à Paris en 1900 est un excellent exemple du contre jeu des noirs s’ils ne se découragent pas après 11.Df3 ? Fxb3 12.Fxf8

L’encyclopédie des ouvertures d’échecs propose 12.Fg5 comme une amélioration possible avec un gros avantage pour les blancs. Je ne comprends pas trop où se trouve l’avantage après 12….Dxg5 13.Cxc7 Rd8 14.Cxa8 Cxd4 15.Dxb7 Cxc2 16.Rf1 Fc4 les blancs lutent pour leur survie. (diagramme 7)

Donc après 12.Fxf8 Fa4 13.Fg7 Fxb5 ! 14.Fxh8 Cxd4 15.Dc3 Dg5 et malgré une tour de plus les blancs sont très mal (diagramme 8). Voyez la suite de la partie Mieses / Burn.



(photo : J.Mieses)










(photo; A.Burn)
Méthode N°2

La partie de référence est Tartakower / Spielmann jouée à Ostende en 1907.
Donc après 7….Cf5 8.g4 ! est le plus fort à mon avis. 8….a6 le coup est forcé car l’alternative 8….Ch6 9.g5 ! Cf5 10.Dd5 De7 11.Cxc7 etc… n’est pas terrible pour les noirs. Voyez la similitude avec la ligne que nous regarderons plus tard. (diagramme 9)





Après 8….a6 9.gxf5 axb5 10.fxg6 De7

Si 10….f6 alors 11.g7 ! Fxg7 12.Dh5 Re7 13.Df7 Rd6 14.Dxg7 (diagramme 10) et les blancs doivent gagner.






La suite de la partie 11.gxf7 Rd8 Le pion en f7 est un clou sur le cercueil de Dracula. 12.d3 Cd4 13.Dh5 Fg7 (diagramme 11)

Tartakower indique la ligne suivante 13….Cxb3 14.cxb3 ! et non 14.Fg5 à cause de 14….Cxa1 15.Fxe7 Fxe7 avec avantage aux noirs.






La suite ! La suite ! 14.Cf3 Ta6 15.Cxd4 exd4 16.Rd1 ! (diagramme 12)

Dans la partie, Tartakower joua 16.Rf1 et gagna. Il indique bien 16.Rd1 dans ses analyses, mais le critique à cause du sacrifice de qualité 16….Te6 ?? Qui perd simplement après 17.Fxe6 Dxe6 18.Fg5 Ff6 19.Te1 et la menace Te8 est mortelle.



Bref après 16.Rd1 ! Les blancs gagnent. On peut essayer pour finir en beauté 16….Tg6 17.Te1 Df6 18.h4 h6 19.Fg5 ! hxg5 (diagramme 13) 20.Dxh8 ! Fxh8 21.Te8 mat







(photo ; S.Tartakower)



Je vous laisse la torche dans les mains avec vos deux nouveaux amis (Dracula et Frankenstein), de mon côté je vais me coucher. Bon courage ! (photo : R.Spielmann)
 
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